dimanche 7 octobre 2018

Août 1915 - Du côté de Craonne

Ce matin à 4h le canon a tonné avec rage du côté de Craonne.

Pages 55 et 56 du carnet de Léon Mellard

(page 55)
Et je pense que nous irons ensuite dans un secteur dangereux.
Allons, à la grâce de Dieu !
Jeudi 5 août : Nous voici à Coulommes La Montagne depuis hier soir à 11H1/2.
Nous allons faire l'exercice chaque jour pendant 20 j.



Mardi 10 août : Nous voici à Bourgogne, petit bourg entre Ventelay et Bouvancourt, depuis hier après-midi à 2H.
Nous sommes partis de Coulommes hier matin à 6H1/2 et on a fait 20 à 22 km. Il a fait tellement chaud que nous étions obligés de faire des pauses tous les 2 km et plus de la moitié sont restés en route. Nous sommes arrivés à 5 sur 10, les autres 5 sont arrivés une demi-heure, une heure après.
J'ai dû faire un grand effort et prendre tout mon courage pour ne pas rester en route aussi.

Plus de 10 sont tombés sur la route et ne pouvaient plus se relever. On était à Coulommes pour 20 j. et on a reçu ordre

(page 56)
dans la nuit de dimanche à lundi de venir ici. Combien de temps resterons nous ici ? Il paraît que les Allemands ont attaqué 2 fois à 7 km d'ici. Et ce matin le canon a tonné sans arrêt pendant 1H. Que va-t-il arriver ? Beaucoup de troupes allemandes arrivent, paraît-il, nos aéros les signalent.
Il y a un an, c'était le bonheur, nous étions réunis, Hélène et moi et jusqu'au 28 août nous allions nous voir chaque jour. Quel changement maintenant ! Non seulement loin de l'autre, mais séparés par une ligne, par un fossé infranchissable pour le moment, et jusqu'à quand ? Dieu seul le sait. Et de plus sans aucune nouvelle, sans aucun mot d'encouragement et de consolation l'un pour l'autre. Que c'est triste, que c'est dur !
Jeudi 12 août 9H : Nous venons de rentrer d'une marche de 12 km. Je crois qu'il va pleuvoir. Rien d’Hélène encore.

Pages 57 et 58 du Carnet de Léon Mellard

(page 57)
Samedi 14 août : Je suis dans un gourbi depuis hier soir à 10H1/2. Nous sommes partis de Bourgogne le 13 à 8H (du) soir. Je suis près de Cormicy pour le moment, à 3 ou 4 km des tranchées allemandes. Il pleut chaque jour et nuit et bien fort. Rien encore d'Hélène, que c'est long !
Dimanche 15 août 1915 : Il y a un an aujourd'hui j'ai assisté à la messe à 8H1/2 en plein air sous bois. Nous avons été travailler cette nuit près de Berry-au-bac.
Jeudi 19 août : Parti de Cormicy le 17 au soir pour Pouillon où nous avons passé la journée du 18. Nous sommes arrivés ici, aux tranchées, hier soir à 10H en face du fort de Brimont.
Samedi 21 août 1915 : Rien encore d'Hélène, que c'est long ! Rien de nouveau ici. Ce matin à 4H le canon a tonné avec rage du côté de Craonne.
Dimanche 22 août : Nous avons eu alerte hier soir à 10H1/2. La 2° escouade était de garde de 8H à 12H. La 1°, nous venions de nous endormir dans le gourbi quand le caporal est venu crier « aux armes ! »

(page 58)
On s'est levé et équipé immédiatement et sommes allés aux créneaux. Les Allemands avaient tiré une vingtaine de coups de fusil et le caporal ne savait pas ce que cela voulait dire puisqu'ils ne tirent que rarement. On est resté aux créneaux 5 minutes et on est revenu coucher pour se relever encore à minuit pour prendre la garde jusque 4H ce matin.
Reçu hier une carte de Lucien Turlotte, il me dit que Liévin est évacué par les civils à cause d'un bombardement intensif.
Rien encore d'Hélène. Rien d'Hélène !
Il fait beau aujourd'hui mais de minuit à 5H il fait déjà bien frais.
Lundi 23 août 1915 : Notre artillerie (pièces de 155) a bombardé les tranchées et réseaux de fils de fer allemands, juste en face d'ici, hier après-midi.
Elle a lancé une cinquantaine d'obus. Nos 75 se sont ensuite mis de la partie et ont envoyé une soixantaine d'obus juste dans les tranchées.
De leur côté, les allemands nous (ont envoyé une vingtaine de 77 dans nos tranchées)

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